Les rillettes

Sacré Henriette, elle nous « Mans » ou nous joue des « Tours » ? 🤔

 

D’aussi loin que je puisse me souvenir, ma grand-mère nommait déjà les « rilles » ou les « grosses rilles » en parlant des rillettes lors du tue-cochon à la ferme et le temps faisant son œuvre lorsque je me suis rapproché de la profession de charcutier , j’ai pu mieux comprendre que cette dénomination n’était pas uniquement liée à ma grand-mère, mais qu’elle avait des origines beaucoup plus anciennes.

Déjà citée au XVᵉ siècle sous différentes appellations ; rillée, rihelle, rihellettes ou rilles, on la retrouve mentionnée dans plusieurs ouvrages d’auteurs connus.

Rabelais en parle comme :« une brune confiture de cochon »,

Proust en parle, Honoré  De Balzac (natif de Tours) les mentionne en vantant leurs vertues !

 

A l’époque ce sont simplement de petits morceaux de porc qui y sont désignés pour y être découpés en fines bandes d’où son rapport au mot « rille » déformation du mot « reille » désignant une bande.

 

Du haut de mes 8 ans je côtoyais la charcuterie où travaillais mon père à Saint-Aubin des Coudrais au « Rillettes du Moulin » maison Saussereau créée en 1946…dire que c’était un peu mon terrain de découverte ne serait pas mentir, une seconde famille !!

Les fourneaux au bois étaient menés par « Gabi », un gars au courage incroyable qui remuait à l’aide d’une énorme spatule en bois les rillettes, avec entrain, de l’allumage des feux  en après-midi jusqu’à la surveillance nocturne des marmites à demi couvertes et cela jusqu’au lendemain matin!

Au petit jour, cela humait bon dans l’enceinte de fabrication, à l’arrivée de ses collègues et de Pierre( fils des patrons) vers 4h30..

Malgré le froid nocturne, tout s’enchaînait Madeleine, la patronne nous servait un chocolat chaud pendant que Roger, le patron était aux abattoirs.

Ils allaient finir avec la mise en terrines (en grès, à l’époque!) mais qui avec le temps pesant lourd dans la manutention, la difficulté du transport et le coût de revient, font place aux pots (en carton alimentaire, puis en plastique).

Tout gamin, le fait de voir cette couche de graisse recouvrant ces terrines et pots ne m’engageait guère à y plonger le couteau pensant qu’elles étaient trop grasses ; mais c’était sans savoir que cette pellicule de saindoux était là pour protéger le produit et aider à sa conservation !

 

L’histoire des rillettes est déjà dans le quotidien des fermes dès le XV ème siècle.

Mais ce n’est qu’en 1865, que l’on voit apparaître dans les livres d’artisans charcutiers le terme « rillettes » pour ensuite en 1896, elle soit reconnue comme production industrielle.

L’association entre Bordeau et Chesnel en feront un produit phare de la charcuterie en grande distribution , tout comme la maison Bahier qui suivra le même chemin.

 

Les rillettes du Mans doivent leur notoriété à Albert Lhuissier de Connerré, qui en amènant cette charcuterie facilement « tartinable » sur les abords des quais de gare qui dessert un axe de la capitale à la Bretagne ; fait ainsi le bonheur des cheminots qui les feront connaître jusqu’à Paris.

En devenant la génèse des rillettes Sarthoises, Connerré devient incontournable. Mais l’origine des rillettes n’est pas Sarthoise !

D’origine Tourangelle incontestablement, elle obtient son I.G.P (les rillettes de Tours), pendant qu’en région Mancelle une variante de sa recette d’origine  crée un cercle de partisans gourmands.

 

 

Du temps de ma grand-mère, on fait les rillettes avec le trop de gras et les petites viandes qui restent après avoir garder les morceaux les plus nobles pour les fabrications classiques.

Mais sa popularité tient au fait que l’on vient à la concevoir avec des morceaux dédiés comme l’épaule de porc notamment voir du jambon et autres morceaux du porc.

Les rillettes de Tours sont cuites à découvert, leur conférant ainsi une couleur brune et une structure pas trop grasse. Les rillettes du Mans, quant à elles, sont cuites à couvert, offrant ainsi une souplesse et une texture tartinable ce qui en fait la plus connue et consommée loin devant sa rivale de Tours !

 

Aujourd’hui, dignement représentées par leur confrérie respective, les rillettes, et plus particulièrement celles du Mans, voient leur concours (qui à lieu en février, à Mamers, cité de la Confrérie des chevaliers des rillettes Sarthoises) se distinguer par un engouement national ainsi que l’élaboration de certaines recettes plutôt originales amenant ce produit « basique » en son temps à évoluer gastronomiquement avec aussi, son festival « le printemps des rillettes » (à Connerré, en Mars).

L’année 2023 voit Mathieu Pissot (Saint Aubin des Coudrais) médaillé d’or 🥇!

Alors, si vous devez aller à Tours, prenez le temps de vous arrêtez à Connerré (à la maison Prunier) ou au Mans, et sans détour sur la route des rillettes, faire une redécouverte pour son printemps !

Et pour les gourmets gourmands, une recette de rillettes maison est disponible sur mon site juste ici ! 😉